L’huissier prend les meubles
Combattre les préjugés – L’Huissier vient prendre les meubles
Tel est le troisième des cinq préjugés que nous allons tenter de déconstruire.
En effet, en vertu de l’article 519 §1er, °4 du Code judiciaire, l’Huissier de Justice est seul compétent et est effectivement tenu d’exercer son ministère pour les ventes publiques judiciaires de biens mobiliers et de navires dans le cadre de l’exécution forcée.
Néanmoins, avant d’en arriver à l’adjudication des meubles les étapes sont multiples.
Premièrement, toute saisie, pour être réalisée, doit nécessairement se baser sur un titre exécutoire (ex : un jugement ; une contrainte fiscale ou non fiscale ; un acte notarié ; etc.).
Ensuite, pour pouvoir entamer l’exécution forcée à proprement parler, il y a lieu de faire signifier ledit titre, c’est-à-dire le porter à la connaissance du justiciable. En effet, toute décision qui prononce une condamnation ne peut être exécutée qu’après avoir été signifiée à la partie succombant, et ce, conformément à l’article 1495 de notre Code judiciaire.
Deux cas de figure peuvent dès lors se produire :
- Le jugement est exécutoire par provision: l’Huissier fera une signification-commandement à la partie – les éventuels recours sont sans effet ;
- Le jugement n’est pas exécutoire par provision: l’Huissier procèdera donc en deux temps avec une signification suivie d’un commandement de payer, lui aussi signifié, mais un mois après ;
En théorie, l’Huissier pourrait se déplacer, au plus tôt vingt-quatre heures après le commandement, pour procéder à la saisie-exécution mobilière.
En pratique, cet officier public ministériel laissera un délai un peu plus long pour laisser une énième chance au débiteur de procéder au(x) paiement (s) réclamé (s). S’il constate que le débiteur commence à réaliser des paiements partiels raisonnables, il postposera son intervention de saisie jusqu’au moment où le débiteur viendrait à ne plus respecter ses engagements.
Dans ce cas, si la saisie mobilière venait tout de même à devoir être réalisée, l’Huissier se rendra sur place, accompagné d’un témoin. Lors de cette « visite », il dressera un inventaire des biens (un procès-verbal de saisie) qui aura pour effet de rendre les biens indisponibles pour le débiteur (ils devront obligatoirement rester sur place, et n’être ni jetés, aliénés ou disparus sous peine d’être suivi pénalement). Il s’agit en fait d’une garantie. Dans cet exploit sera mentionné l’indication des lieu, jour et heure de la vente, conformément à l’article 1511 du Code judiciaire. Cette vente aura lieu au plus tôt un mois après la saisie.
L’image de l’Huissier qui vient uniquement prendre les meubles est donc fausse, compte-tenu de la multitude d’étapes et de possibilités laissées au débiteur de s’exécuter. De plus, dans l’imaginaire collectif, les gens oublient de différencier deux choses bien distinctes :
- Le procès-verbal de saisie qui est un inventaire répertoriant les biens ;
- Le chargement des biens saisis qui est l’étape ultime de la procédure ;
L’huissier reste un interlocuteur entre les parties. L’objectif étant non pas de réduire le patrimoine du débiteur à néant, mais de convenir d’une solution la moins dommageable pour toutes les parties.